Les réactions fusent de partout après l'adresse à la nation de l'ex-président de la République démocratique du Congo (RDC), Joseph Kabila, dans la soirée du vendredi 23 mai 2025 depuis l'étranger. Au quartier général du camp Tshisekedi, Peter Kazadi et Doudou Fwamba, respectivement ancien ministre de l'Intérieur et ministre des Finances brisent les silences avec des accusations graves, et de révélations accablantes sur la gestion de la res publica par Kabila pendant 18 ans au pouvoir.
Six ans après son départ du Palais présidentiel, Joseph Kabila, acusé de complicité avec les rebelles du M23, s'est adressé pour la première fois à la Nation, 24 heures après la levée de ses immunités parlementaires.
Dans son allocution, il a critiqué la gestion du pays par le régime de Tshisekedi. Il a dénoncé l'institutionnalisation du tribalisme, l'arrogance, le populisme, la démagogie et le non-respect de la parole donnée sous le règne de Tshisekedi. Il a salué les efforts national, régional, continental et international visant à ramener la paix en RDC.
Face à la crise multidimensionnelle que traverse le pays, Kabila a proposé un « pacte citoyen» en 12 points pour sortir le pays du gouffre, demandant d'«Ordonner le retrait, sans délai, de toutes les troupes étrangères du territoire national. A ce sujet, je salue la décision sage, des pays de la SADC, de retirer les troupes de la SAMIDRC de notre pays.»
Des critiques et accusations de trahison
Cependant, Peter Kazadi, ancien ministre de l'Intérieur, a été particulièrement virulent dans ses critiques.
Selon lui,«Kabila n'a fait que dire les motifs pour lesquelles lui et Paul Kagame font la guerre au pays et tuent sans scrupules les congolais », a-t-il dit.
L'ancien ministre de l'Intérieur souligne que «Kabila ignore la présence de l'armée rwandaise mais demande à ce qu'on chasse les forces invitées légalement par le Gouvernement légitime de la République.», a-t-il déclaré.
Kazadi estime que « tacitement, il [Kabila] appelle les militaires à une désobéissance en leur faisant croire qu'il les payait et entretenait mieux qu'aujourd'hui.»
Il a accusé l'ex-président de la RDC de « se positionne en porte-parole de Paul Kagame en amplifiant les revendications du M23/AFC et du Rwanda. Il justifie la justesse de leurs actions sur notre territoire et appelle le peuple de l'Est à s'opposer au Gouvernement de la République au motif que ce dernier l'a étouffé par la restriction des opérations bancaires.»
Kazadi n'a pas hésité à dénoncer les liens de Kabila avec certains officiers militaires, qu'il qualifie de complices de la trahison.
« Il revendique leur loyauté car il est celui qui les a recrutés et formés», a-t-il affirmé. Et d'ajouter : « Il se revendique leader de tout celui qui s'oppose au régime.»
De plus, Peter Kazadi a critiqué Kabila pour sa tentative de séduire les évêques catholiques en accusant le régime de refuser le dialogue.
« Comme nous le savons, Kabila n'est pas étrangé aux désordres actuels qu'il a bien planifié pour revenir en dernier lieu comme un rempart (...) Il soutient l'idée de Kagame suivant laquelle : tant qu’il n’y aura pas de dialogue intercongolais, la guerre ne prendra pas fin (...) il se victimise et fait preuve de lâcheté en niant son passage à Goma.», a-t-il déclaré.
Des révélations accablantes sur la gestion de Kabila
Doudou Fwamba, ministre des Finances, a quant à lui dressé un tableau sombre de la gestion de Kabila durant ses 18 années au pouvoir. Il a évoqué des actifs miniers cédés à vil prix, des milliards de dollars disparus et des assassinats politiques.
« Des actifs miniers cédés à vil prix pour des intérêts privés durant 18 ans, des milliards de dollars américains de royalties issues des joint-ventures concédées à des amis étrangers, des centaines de millions de dollars retirés directement de la Banque Centrale du Congo pour une destination inconnue, comme le cas des 350 millions USD de pas de porte de la TFM, des millions USD de fonds publics octroyés en cadeau pour la création d’entreprises privées familiales. », a-t-il révélé.
L'argentier national a également dénoncé les actes de violences et des massacres de la population civile sous le règne de Kabila.
« Des morts, assassinats, crimes contre l’humanité, comme les massacres des adeptes de Bundu Dia Kongo, Mukungubila, Kamwina Nsapu, des pauvres citoyens lâchement abattus lors des manifestations pro-démocratie… Bref, tous ces amis assassinés, tous ces visages innocents… », a-t-il indiqué.
Le ministre n'a pas passé sous silence le mauvais traitement de fonctionnaires de l'Etat sous l'imperium de Kabila.
« Des enseignants clochardisés, avec un salaire de 45 à 60 USD par mois, des professeurs d’université sans assurance maladie ni autres garanties, des sociétés publiques démantelées pour appartenir à une seule famille. », a-t-il décrié.
Par ailleurs, les déclarations de Kabila et les réponses du camp Tshisekedi mettent en lumière les fractures qui traversent
la société congolaise. La question demeure : comment la RDC pourra-t-elle sortir de cette impasse politique et sociale ? A chacun sa réponse !
Enock Mwaka